COVID-19 : comment les représentations des maladies transmissibles ont pesé sur la gestion de la pandémie par l’OMS ?

Je suis intervenu le 26 septembre 2024 dans le cadre de la journées d’étude “De la démobilisation pandémique au Covidactivisme” organisée par l’association Winslow Santé Publique et le laboratoire Cermes3 (CNRS, INSERM, EHESS, Université Paris Cité), sur la question de savoir comment les représentations des maladies transmissibles ont pesé sur la gestion de la pandémie de COVID-19 par l’OMS.

Introduction

La pandémie de COVID-19 est l’objet de controverses et polémiques depuis le début de celle-ci il y a bientôt 5 ans. Et ce que je viens de dire, qui laisse entendre que la pandémie est toujours en cours, fait d’ailleurs partie des polémiques toujours actuelles. D’autres sujets à propos de cette maladie récemment émergée ont prêté et prête encore à désaccords : celui de son traitement thérapeutique (polémique entretenue par les tenants de l’hydroxychloroquine mais réglée sur le plan du consensus scientifique) ; celui de sa saisonnalité hivernale ; celui de sa perte intrinsèque de sévérité ; celui de l’intérêt de la vaccination pour la population générale ; celui des affections durables post phase aiguë ; celui d’une supposée “dette immunitaire” qui aurait été contractée du fait des mesures sanitaires, et en particulier des confinements et du port du masque ; celui également de savoir si COVID-19 est féminin ou masculin, etc.
Ce dont je voudrais parler aujourd’hui porte sur la question des voies de transmission du virus SARS-CoV-2 à l’origine de la COVID-19. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a varié sur le sujet, et sa position actuelle est très éloignée de celle qu’elle a adoptée au début de la pandémie. Pour éclairer la controverse sur ce point, je propose de recourir à une méthode d’épistémologie historique, qui permet, à mon sens, de comprendre en partie le poids de l’un des modèles de propagation des épidémies d’infections respiratoires, initialement soutenu par l’OMS. Ce modèle est celui de la transmission par contact et par gouttelettes sur de faibles distances, auquel a été opposé un autre modèle, celui de la transmission aéroportée d’aérosols sur de plus longues distances.
Il ne s’agit pas seulement de modèles descriptifs, mais de modèles de pensée qui s’enracinent dans l’histoire, raison pour laquelle j’adopte une approche d’épistémologie historique. La controverse entre le modèle par contact et le modèle par l’air est particulièrement connue à travers l’opposition entre les contagionistes et les infectionistes dans la première moitié du XIXe siècle, mais on trouve les racines du modèle aérien dans l’Antiquité gréco-romaine, et celles du modèle du contact également, avec un développement particulier depuis la Renaissance. En outre, au tournant du XIXe siècle et dans les décennies suivantes, des motifs économiques ont été mis en avant pour soutenir un modèle plutôt que l’autre, comme cela est le cas concernant le SARS-CoV-2. L’approche d’épistémologie historique ne prétend donc pas exposer tous les motifs de prédominance d’un modèle sur l’autre, mais n’en soutient pas moins que des modes de pensée, ancrés dans des pratiques, font culture, et rendent compte en partie des discours énoncés et des décisions prises.

Conférence intégrale visionnable sur Youtube

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